Test d'infiltrométrie

1. Définition et objectif d’un test d’infiltrométrie

Un test d’étanchéité à l’air (aussi appelé: test d’infiltrométrie, mesure de perméabilité à l’air des bâtiments, test porte soufflante ou en anglais Blower-door test) permet de mesurer les infiltrations d’air « parasites » d’un bâtiment, c’est-à-dire hors ventilation.

Le test d’étanchéité à l’air a une double fonction : d’une part, il permet d’évaluer le taux (ou le débit) de fuite, ce qui permet de  qualifier l’enveloppe du bâtiment, et d’autre part, de révéler les passages parasites d’air de manière à pouvoir les corriger.

Il existe deux façons d’exprimer le débit de fuite d’un bâtiment :

– la méthode européenne qui réfère le débit de fuite mesuré sous 50 Pa (différence de pression entre l’intérieur et l’extérieur du bâtiment) au volume du bâtiment : n50 qui s’exprime en vol/h. Cette méthode est la plus satisfaisante et fournit une indication pertinente de la qualité des enveloppes. C’est aussi la seule évaluation qui soit utilisée dans toute l’Europe. Cet indicateur est utilisé pour les labels Passivhaus, Minergie-P, Minergie-P-Eco ou Minergie-A. L’indicateur ne doit pas dépasser 0,60 vol/h (ou h-1) quel que soit le type de bâtiment.

– la méthode française qui mesure ce débit sous un écart de pression intérieur/extérieur de 4 Pa et réfère cette valeur à la surface des parois déperditives, à l’exception des planchers bas (dénommée ATbât dans l’étude thermique) : Q4PaSurf qui s’exprime en m3/ (h.m2). Cette mesure est celle du calcul réglementaire français. Elle privilégie l’idée que les infiltrations d’air se font essentiellement par les parois extérieures ;

Pour une maison individuelle, ci-après une échelle de valeurs de Q4PaSurf pour la mesure d’infiltrométrie (exprimée en m3/h/m²) :

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  • Q4Pa-surf < 0.2 m3/h/m2 ⇒ Bâtiment passif (il s’agit d’un ordre de grandeur, la valeur à respecter est de n50<=0,60 h-1 selon la norme européenne)
  • Q4Pa-surf < 0.6 m3/h/m2 ⇒ Bâtiment BBC Effinergie et RT2012
  • Q4Pa-surf < 0.8 m3/h/m2 ⇒ Valeur de référence de la RT2005 et dans le cadre du label BBC Effinergie Rénovation
  • Q4Pa-surf < 1.3 m3/h/m2 ⇒ Valeur par défaut de la RT2005

Le dessin ci-après représente la dimension équivalente à la taille du défaut d’étanchéité permettant de laisser passer le débit de fuite indiqué.

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2. Pourquoi est-il important d’avoir une bonne étanchéité à l’air ?

Les inconvénients associés aux infiltrations d’air sont nombreux :

étanchéité-logement-et-confort– l’inconfort : ce désagrément est prioritaire pour les occupants. À titre d’exemple, il n’est pas rare,  les jours de grand vent en hiver, que la température dans les logements s’abaisse à 13 °C. Le débit d’air traversant les logements est alors considérable et insupportable. Dans les bâtiments récents, relativement performants, ce sentiment d’inconfort est ressenti de manière encore plus vive par les occupants dont le degré de tolérance à ce genre de nuisance semble diminuer au fur et à mesure que le niveau de confort augmente.

– les salissures et moisissures : là où l’air s’infiltre, les parois sont évidemment plus froides et elles sont donc le siège de condensations, donc de moisissures. C’est sur ces surfaces humides que les poussières vont se coller, faisant apparaître les fameuses « moustaches » matérialisant la trajectoire de l’air.

– les nuisances sonores : la qualité acoustique d’une paroi est très fortement altérée par un orifice aussi petit soit-il. Il s’ensuit que toutes les infiltrations constituent de petits ponts phoniques détériorant l’affaiblissement acoustique d’une paroi extérieure.

– la surconsommation d’énergie : dans les bâtiments basse consommation, les infiltrations d’air peuvent augmenter sensiblement la consommation de chauffage même si, du fait de leurs performances, cette surconsommation aurait un impact limité sur la facture d’énergie globale. Sur la figure suivante, on voit l’impact du taux de renouvellement d’air « parasite » sur le besoin en chauffage d’une maison passive.

infiltrations-et-besoins-de-chauffagePour fixer les idées il faut avoir à l’esprit qu’une variation de 1,0 vol/h sous 50 Pa au test de la porte soufflante conduit à une augmentation de la consommation de 4 kWhep/m²shon/an. Lorsque les besoins de base étaient de 200 kWhep/m²shon/an, les défauts d’étanchéité importaient peu. Mais lorsqu’on vise des besoins de 65 kWhep/m²shon/an, cela devient prépondérant. Cela l’est encore plus lorsqu’on met en place une VMC double flux qui se charge de réchauffer l’air entrant par la ventilation via un échange de calories de l’air vicié.

passage-de-l-air-exfiltre-charge-de-vapeur-d-eau– les défauts de conservation du bâti : il s’agit d’un phénomène peu connu mais pourtant très destructeur. Dans tout bâtiment, lorsqu’il y a des infiltrations d’air sur une façade, il y a forcément des exfiltrations d’air sur d’autres façades. Mais après son passage dans le logement, surtout lorsque celui-ci n’est pas ou mal ventilé, l’air exfiltré est chaud et très humide. Durant son exfiltration, l’air apporte alors une grande quantité de vapeur d’eau qui se condense dans l’épaisseur des parois. En fonction de la nature de celles-ci, notamment lorsqu’il s’agit de constructions à ossature bois, le phénomène peut conduire à un pourrissement massif de la structure. Le diagnostic à établir n’est pas celui d’un mauvais contrôle de la diffusion de vapeur dans les parois, mais celui d’un très mauvais contrôle des infiltrations et exfiltrations d’air. Les masses d’eau véhiculées sont infiniment plus importantes avec les exfiltrations d’air que par la migration de vapeur.

3. D’où proviennent les infiltrations d’air

Les sources d’entrée d’air sont multiples et souvent un peu surprenantes. Les infiltrations d’air ne se produisent que lorsqu’il y a un tant soit peu de vent, sauf pour les bâtiments de grande hauteur où le tirage naturel, dû à l’effet cheminée, peut introduire des infiltrations d’air en partie basse et des exfiltrations en partie haute, en l’absence totale de vent. Il faut également considérer que dans un bâtiment, les causes d’infiltration d’air en façade sont réparties de façon sensiblement homogène sur l’ensemble des parois du bâtiment. Les sources d’infiltrations d’air sont variées :

perméabilité-a-l-air-de-l-enveloppe-des-bâtiments– les parois extérieures ;

– les menuiseries extérieures elles-mêmes, et leur jonction avec les murs ;

– les seuils de porte ;

– la jonction des toitures et des murs, souvent très délicate à traiter ;

– les joints de dilatation ;

– les trappes d’accès aux combles ou à des gaines techniques non étanches ;

– la traversée de l’enveloppe étanche à l’air par des conduits (ventilation, fumées, etc.) ou par des fourreaux (câbles électriques, chauffage, etc.) ;

– la traversée de l’enveloppe étanche à l’air par des éléments de structure (pannes, charpente, etc.) ;

– les fourreaux de passage des câbles électriques (principales sources de pénétration d’air dans les bâtiments) ;

– les coffres de volets roulants ;

– etc.

4. Comment effectuer un test d’étanchéité à l’air ?

Le test à la porte soufflante consiste à remplacer la porte d’un bâtiment ou d’un logement par une membrane souple plaquée de manière étanche sur le dormant de la porte et dans laquelle on peut incorporer un ou plusieurs ventilateurs qui vont permettre la mise en pression ou en dépression du bâtiment.

Pour réaliser une mesure, le ventilateur de la porte soufflante va créer artificiellement une différence de pression entre l’intérieur et l’extérieur du local testé. Le test d’infiltrométrie (dit test d’étanchéité à l’air) permet de mesurer la quantité d’air rentrant par les fuites dans un bâtiment et d’identifier la localisation de celles-ci.

Au préalable, l’opérateur prend le soin d’obturer tous les orifices volontaires (ex. bouches d’extraction de ventilation, siphon des lavabos, etc.) afin que le flux d’air provoqué par la différence de pression ne provienne que des fuites parasites. On mesure alors le débit de fuite pour une différence de pression imposée.

Préparation

Il faut d’abord fermer toutes les ouvertures donnant sur l’extérieur (fenêtres, porte, trappe de ventilation, placards), et prendre soin de laisser les portes intérieures ouvertes (excepté celle des WC) pour permettre la libre circulation de l’air dans le bâtiment et assurer une pression identique en tous points. Les systèmes de chauffage et/ou d’ECS (Eau Chaude Sanitaire) sont interrompus.

Le test

Une fois le ventilateur en marche, une surpression (ou une dépression) s’établit à l’intérieur du bâtiment par rapport à la pression extérieure. Le manomètre mesure la différence de pression établie ainsi que la pression dite dynamique au niveau du passage d’air du ventilateur. La pression dynamique est convertie en un débit de fuite nécessaire à l’établissement de la différence de pression. La mesure doit être ainsi effectuée pour plusieurs différences de pression entre 10 et 100 Pascals. Une dépression de 50 Pascals correspond à un vent d’environ 32 km/h appliqué sur toutes les façades du bâtiment.

L’opérateur ajoute ou retire des anneaux du ventilateur suivant le débit souhaité pour permettre à ce dernier de garder une cadence suffisante pour maintenir une pression à un certain niveau. Pour les bâtiments très volumineux, l’emploi de plusieurs ventilateurs peut être utilisé.

On réalise ensuite une régression linéaire des points mesurés selon la méthode des moindres carrés, ce qui permet de connaître le débit de fuite, quelle que soit la différence de pression entre l’intérieur et l’extérieur du bâtiment.

À noter qu’avant et après les tests, la stabilité de la pression à débit nul dans le ventilateur est mesurée sur une période de 30 secondes au moins. Selon la norme NF EN 13829, lorsque la fluctuation de pression est supérieure à 5 Pascals, la mesure ne sera pas considérée comme valable. Les instabilités sont souvent dues à un vent trop fort ou en rafale.

Un test à la porte soufflante nécessite 15 à 30 minutes pour être effectué dans un logement, et une à deux heures dans un bâtiment plus important. La durée de l’intervention peut ensuite se prolonger si l’on recherche les sources d’infiltration d’air au moyen de fumigènes.

Recherche des fuites

La différence de pression est maintenue par le ventilateur à 50 Pa pendant que l’opérateur de test procède à la recherche obligatoire et à la localisation des infiltrations au moyen d’une des 4 techniques suivantes :

  • Par anémomètre qui détecte le déplacement de l’air à l’endroit de l’infiltration. Cette méthode peut s’avérer mauvaise si l’orientation du fil chaud de l’anémomètre n’est pas bonne.
  • Par une fumée artificielle qui s’infiltre aux endroits perméables. Cette méthode fonctionne toujours et est la plus concrète et la mieux comprise des entreprises.

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  • Par l’intermédiaire d’une caméra thermique. Cette méthode ne fonctionne que lorsque la différence de température entre l’air intérieur et extérieur est suffisante pour être détectée par la caméra.

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  • Par détection manuelle (sensation de courant d’air détectée avec la main). Cette méthode est réductrice mais à l’avantage d’être rapide.

5. Quand réaliser  un test d’étanchéité à l’air ?

En pratique, il est recommandé de l’utiliser deux fois au cours d’une opération.

La première fois en cours de travaux lorsque le clos et le couvert sont terminés. Il ne s’agit alors pas de mesurer le débit de fuite mais seulement de mettre le logement ou le bâtiment en dépression et de repérer les points d’infiltration au moyen de fumigènes ou d’une caméra thermique. L’état d’avancement du chantier permet alors très facilement de remédier aux défauts que l’on pourrait avoir repérés. Ce test, qui n’a rien de réglementaire ni d’obligatoire, peut être fait par n’importe qui (architecte, BET, entreprise) sans même avoir recours à une mesure des débits d’infiltration puisque le seul objectif est simplement de visualiser les fuites afin d’y remédier aisément.

La seconde utilisation du test se fait au moment de la réception du bâtiment. Il s’agit cette fois de mesurer le débit d’infiltration et de valider les objectifs qui étaient fixés par l’étude thermique.